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Festival du Film Africain de Louxor 2024 – Hommage à Ahmed Hafiene

- Culture
janvier 12, 2025

Le festival du Film Africain de Louxor (Egypte) a rendu hommage à l’acteur tunisien Ahmed Hafiene lors de la cérémonie d’ouverture et a par la suite projeté l’un de ses films « Fatwa », réalisé par Mahmoud Ben Mahmoud.

Lors de la 14ème édition du Festival du Film Africain de Louxor qui se déroule du 9 au 14 janvier 2024, l’acteur tunisien Ahmed Hafiene a été honoré pour l’ensemble de sa carrière. Cet hommage émouvant a eu lieu lors de la cérémonie d’ouverture au cœur du somptueux temple de Louxor.

 

 

Deux jours plus tard, la célébration a été suivie par la projection de l’un de ses films les plus marquants, Fatwa, réalisé par Mahmoud Ben Mahmoud.

Ahmed Hafiene, dont le talent a été salué à de nombreuses reprises, a brillé dans Fatwa. Ce film lui a valu plusieurs distinctions prestigieuses, notamment le Prix du Meilleur Acteur aux Journées Cinématographiques de Carthage en 2018. Outre ce prix, Fatwa a également remporté le Tanit d’Or, une reconnaissance majeure dans le monde du cinéma arabe et africain.

En 2019, Ahmed Hafiene a continué de récolter les honneurs pour son interprétation dans ce film. Il a reçu le Prix du Meilleur Acteur au Festival du Film Arabe de Malmö, après avoir été distingué au Festival Vues d’Afrique à Montréal et au Festival du Cinéma Tunisien. Chaque fois, son rôle dans Fatwa a été salué pour sa profondeur et son intensité.

 

 

Avant la projection, Ahmed Hafiene a tenu à saluer le public en exprimant sa grande joie d’être honoré et de voir son film projeté dans le cadre du festival. Il a rappelé que le film avait remporté de nombreuses récompenses et qu’il avait lui-même été primé pour son interprétation dans ce long-métrage, affirmant : « Je suis heureux d’être ici au festival et de recevoir cet hommage prestigieux. »

Ahmed Hafiene a adressé un message au jeune public, en particulier aux adolescents présents en grand nombre à la projection, les exhortant à faire preuve de vigilance, car la jeunesse peut, à certains moments, être une période propice à la déviation. Il a souligné que le cinéma et les films l’avaient sauvé de tels dangers lorsqu’il était jeune.

Lors de son intervention, Ahmed Hafiene a déclaré : « Ce qui m’importe le plus, c’est que nous avons réalisé ce film pour les jeunes. Bien que le titre soit Fatwa, le thème central est la douleur des parents qui perdent un enfant à cause d’un danger omniprésent : le terrorisme. » Il a ajouté que le film véhiculait des émotions fortes et qu’il espérait que le public les apprécierait.

 

 

Après la projection, Ahmed Hafiene a pris le temps d’écouter les avis et questions des jeunes concernant le film, son concept et son interprétation, car il aborde une question cruciale : celle du terrorisme et des groupes armés qui attirent les jeunes.

L’acteur a exprimé sa fierté de participer à ce projet, affirmant que le film s’adressait avant tout au grand public. Il a précisé que le tournage avait eu lieu en 2013, une période où la Tunisie figurait parmi les principaux pays exportateurs de terrorisme. « Le terrorisme est une question fabriquée. Lorsque les sociétés progressent, le terrorisme surgit pour freiner tout progrès social, culturel ou économique. La culture, en revanche, est la locomotive du développement et de la renaissance sociale et culturelle », a-t-il conclu.

 

 

Fatwa raconte l’histoire de Brahim Nadhour, un Tunisien installé en France, qui revient à Tunis après la mort suspecte de son fils Marouane, officiellement victime d’un accident de moto. En enquêtant, Brahim découvre que Marouane militait dans une organisation salafiste, ce qui le pousse à douter des circonstances de son décès. Le film explore les dynamiques complexes entre le père, interprété avec finesse par Ahmed Hafiene, et son fils radicalisé, tout en dénonçant les mécanismes d’endoctrinement. À travers une intrigue haletante, Fatwa met en lumière le conflit entre des valeurs religieuses modérées et des idéologies extrémistes, tout en exposant la douleur et les dilemmes des parents confrontés à la perte et à l’incompréhension.

Le rôle de Brahim, incarné par Ahmed Hafiene, illustre avec brio la lutte d’un père face à ses propres doutes et à une société déchirée. Le film, tout en explorant les mécanismes d’endoctrinement, met en lumière la résistance et le courage nécessaires pour faire face à l’extrémisme.

Parmi les autres acteurs, on retrouve la célèbre Ghalia Benali dans le rôle de Loubna, la mère de Marouane et ex-femme de Brahim, une députée engagée dans la lutte contre l’extrémisme religieux.

Sarra Hannachi incarne Latifa, une jeune femme victime de violences conjugales, tandis que Mohamed Sassi et Ramzi Aziz jouent des personnages clés qui gravitent autour de Brahim dans sa quête de vérité. Le film met également en lumière les obstacles auxquels se heurte Brahim : la peur de parler, le silence complice de la communauté, et l’hostilité des milieux religieux extrémistes.

Le film, tourné en partie dans le souk El Marr, offre une représentation authentique de Tunis, mettant en lumière l’équilibre subtil entre son riche héritage historique et les défis contemporains auxquels elle fait face. À travers les interactions de Brahim avec divers personnages locaux, le réalisateur Mahmoud Ben Mahmoud dresse un portrait complexe et nuancé de la société tunisienne actuelle.

Avec Fatwa, Mahmoud Ben Mahmoud mêle habilement les codes du polar à une réflexion sociale profonde. L’enquête de Brahim sur la mort de son fils devient un prétexte pour explorer les fractures d’une société où les idéologies extrémistes menacent les libertés individuelles et culturelles.

Loin de tout manichéisme, le film dépeint les ravages psychologiques de l’endoctrinement sur des esprits vulnérables. Il illustre également le courage de ceux qui, comme Loubna, osent résister aux pressions et défendre leurs convictions. Ode à la tolérance et à la liberté, Fatwa dénonce avec force l’obscurantisme et appelle à une renaissance culturelle et sociale.

 

 

L’hommage rendu à Ahmed Hafiane au Festival de Louxor est une reconnaissance bien méritée pour cet acteur talentueux, dont les performances ont marqué le cinéma arabe et africain. Son interprétation dans Fatwa reste gravée dans les mémoires, confirmant son statut d’icône du cinéma tunisien.

Neïla Driss