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Houcine Rhili fustige les échecs du secteur et l’absence de décisions politiques

- Tunisie
mars 07, 2025

Crise du phosphate : Houcine Rhili fustige les échecs du secteur et l’absence de décisions politiques

 

L’expert en développement et en ressources hydriques, Houcine Rhili, est intervenu mercredi 5 mars 2025 sur les ondes d’Express FM pour aborder les problèmes qui impactent le secteur du phosphate en Tunisie.

« Pour moi, il n’y a rien de nouveau. Depuis 2012, 17 conseils ministériels et 105 décisions ont été prises, tous autour du phosphate, et rien n’a changé », a déclaré l’invité de l’émission Eco Mag, tout en soulignant que malgré ces efforts, la production a chuté.

« Le plan de développement 2023-2025 prévoyait une production de 12 millions de tonnes, mais en 2024, la prévision était d’environ 8 millions de tonnes, et nous n’avons produit que 3,02 millions », a ajouté M. Rhili.

Il a également mentionné que le secteur du phosphate souffre d’un problème structurel datant de la période entre 2005 et 2008. « Aujourd’hui, l’entreprise est accablée par un nombre important d’employés qui n’ont aucun lien avec le processus de production », a-t-il précisé.

« Actuellement, l’entreprise fait face à de grands problèmes concernant ses équipements de production. Si la Compagnie des Phosphates de Gafsa (CPG) souhaite renouveler le tiers de sa flotte, elle doit investir entre 320 et 340 millions de dinars », a-t-il ajouté.

M. Rhili a également évoqué les problèmes liés aux eaux traitées et au phosphogypse. « Depuis 1992 jusqu’à aujourd’hui, c’est le plus grand dossier qui a été étudié. Des tonnes de documents et d’études ont été produites, mais la décision politique reste absente », a-t-il déploré.

Il a ensuite rappelé que le bassin minier souffre de grands problèmes sociaux, ainsi que de difficultés relatives aux indicateurs de vie et de développement. « L’accident récent entre un bus et un poids lourd n’est qu’une preuve supplémentaire de la situation dans laquelle la région est plongée. Même le transport est dans un état désastreux », a-t-il souligné.

M. Rhili a précisé que la solution pour le secteur du phosphate réside dans l’adoption d’une approche sérieuse par l’État, en définissant clairement le rôle de la CPG dans l’extraction, le raffinage et la vente du phosphate, tout en versant les bénéfices à l’État pour le développement de la région.

« Aujourd’hui, la CPG doit être libérée des responsabilités qui ne sont pas les siennes », a déclaré M. Rhili, en ajoutant : « jouer un rôle social, donner des dons et embaucher des gens qui n’ont aucun lien avec la production, ce n’est pas son rôle. La CPG dispose de 4 400 employés qui assurent la production, mais plus de 9 000 sous-traitants et employés pour des tâches comme le jardinage, soit le double de l’effectif de production ». Il a qualifié cette situation de « corruption sociale opérée par l’État pour acheter la paix sociale ».

« Aujourd’hui, la CPG s’occupe de la collecte des déchets domestiques et finance l’approvisionnement en eau potable des quartiers résidentiels. Ce n’est pas son rôle », a dénoncé Houcine Rhili, précisant que cette politique rend la Tunisie incapable de rivaliser avec des pays comme le Maroc, l’Inde et d’autres producteurs de phosphate. Il a ajouté : « Depuis l’indépendance, la CPG assure le rôle de l’État ».

« Aujourd’hui, la CPG doit se réconcilier avec son environnement social. Chaque protestation peut coûter cher, comme l’exemple de la laverie de Redeyef, fermée pendant cinq ans. En fin de compte, on se retrouve avec des sommes colossales à verser pour qu’elle reprenne son activité », a souligné M. Rhili.

Il est ensuite revenu sur le dilemme du phosphogypse. Il a précisé que ce problème, qui remonte à 1992, nécessite une nouvelle approche. Il a appelé à trouver une solution pour cette matière, classée comme déchet dangereux, et particulièrement pour le golfe de Gabes.

« Dans les grands projets et les affaires stratégiques, la Tunisie souffre de problèmes politiques et non techniques », a conclu M. Rhili.

 

 

 

H.K