5 views 6 mins 0 comments

La chute de Masahiro Nakai, star de la télé japonaise accusée de violences sexuelles

- Business
janvier 23, 2025

Depuis les années 1990, il faisait la pluie et le beau temps dans le monde des médias au Japon, au point d’être connu dans tout l’archipel. À la fois chanteur, ancien leader du boys band ultrapopulaire SMAP, acteur et présentateur, Masahiro Nakai, 52 ans, était omniprésent sur les antennes, animant à lui seul plusieurs programmes télé.

Mais, à la suite d’accusations d’agression sexuelle révélées en décembre dernier par l’hebdomadaire Josei Seven, Nakai a annoncé jeudi 23 janvier dans un texte publié sur son site Internet qu’il mettait fin à ses activités, rapporte le quotidien japonais Yomiuri Shimbun. “Toute la responsabilité [de ce qui s’est passé] me revient. Je suis profondément navré d’avoir causé des problèmes et des dommages à autant de personnes”, y a-t-il écrit, en réitérant ses “excuses” à sa victime présumée.

Selon les médias japonais, les faits qui lui sont reprochés se seraient déroulés en juin 2023, lors d’un dîner avec la plaignante, qui travaille aussi dans le secteur de télévision. Alors que des employés de la chaîne Fuji TV étaient également conviés au repas, ces derniers auraient décommandé au dernier moment, laissant Nakai seul avec cette femme.

Après les faits, le présentateur aurait également tenté de trouver un arrangement avec elle, lui versant la somme de 90 millions de yens (550 000 euros).

“Nous n’avons pas le droit de refuser ces invitations”

La victime présumée a témoigné sous couvert d’anonymat dans plusieurs médias locaux. Dans l’hebdomadaire Shukan Bunshun, elle a laissé entendre qu’elle avait été piégée par les cadres de Fuji TV, qui se seraient arrangés pour qu’elle se retrouve seule avec Nakai. Surtout, elle dénonce une pratique qui se serait normalisée au sein de la chaîne, où les employées et présentatrices sont incitées à “divertir” des célébrités. “Ce sont eux qui ont le pouvoir de sélectionner les participants à leurs émissions, nous n’avons donc pas le droit de refuser ces invitations”, a-t-elle déploré.

Elle se dit surtout abasourdie par la réaction de la direction de Fuji TV, à qui elle a fait remonter les informations, mais qui aurait étouffé l’affaire. La chaîne a démenti toute implication de ses employés dans l’affaire, et Nakai a continué à animer ses émissions pour la chaîne comme si de rien n’était jusqu’aux révélations de Josei Seven.

Confronté à ces révélations et à la multiplication d’accusations similaires, le président de Fuji TV, Koichi Minato, a tenu une conférence de presse le 17 janvier, annonçant la mise en place d’une enquête interne. Arguant que la salle était “trop petite”, il avait pris soin de présélectionner les journalistes ayant le droit d’y assister, sans oublier d’interdire les caméras.

Remise en cause de la confiance dans les médias

Les réactions de la société japonaise à cette affaire ont été violentes. Critiqué de toute part, Nakai a perdu toutes ses émissions, et 75 entreprises ont suspendu leurs publicités sur Fuji TV, rapporte le quotidien japonais Asahi Shimbun.

Acculée, la chaîne a réuni en urgence jeudi un conseil d’administration pour annoncer la tenue d’une autre conférence de presse lundi 27 janvier – cette fois-ci sans limite d’accès – et rassurer sur le caractère indépendant de l’enquête.

Même avec la fin de carrière de Nakai, il n’est pas certain que ces mesures suffisent à éteindre l’incendie. En limitant l’accès à la conférence de presse du 17 janvier, la chaîne a porté un coup dur à la confiance des Japonais dans les médias, affirme le sociologue Noritoshi Furuichi. “C’est un problème du secteur, voire de la société japonaise entière”, lance-t-il, cité par la chaîne Nippon TV. “Dans notre pays, le sexisme est monnaie courante, et certains utilisent des femmes comme des objets. Je crois que c’est quelque chose qui existe dans toutes les entreprises. […] Pour rétablir la confiance des téléspectateurs et des sponsors, il faudrait que Fuji TV prenne une mesure drastique, comme le départ de toute la direction.”