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Ala Marzouki alerte sur les défis de l’eau et les enjeux de la gestion des ressources

- Tunisie
février 12, 2025

Situation hydrique en Tunisie : Ala Marzouki alerte sur les défis de l’eau et les enjeux de la gestion des ressources

 

Ala Marzouki, président de l’Observatoire tunisien de l’eau, est intervenu, lundi 10 février 2025, sur les ondes de Mosaïque FM au sujet de la situation hydrique en Tunisie.

« Les dernières précipitations ont été très bénéfiques et positives pour nos barrages », a d’abord expliqué l’invité de l’émission « Midi Show ». Il a également précisé que le taux de remplissage des barrages a atteint aujourd’hui 34,9 %, ce qui constitue une moyenne positive, surtout qu’à la même date en 2024, le taux de remplissage des barrages ne dépassait pas 19 %.

« Depuis le début du mois de février et jusqu’à aujourd’hui, les Tunisiens ont consommé 20 millions de m³ », a indiqué M. Marzouki, tout en ajoutant que d’autres précipitations sont attendues dans les semaines à venir. « On ne peut parler de zone de confort que lorsque nous dépasserons 40 % du taux global de remplissage des barrages », a-t-il poursuivi.

Ala Marzouki a également indiqué que la carte des précipitations, ainsi que les saisons, ont changé, tout en appelant à prendre en considération ces transformations. Il a aussi ajouté que même les précipitations qui sont tombées dans des zones éloignées des barrages ont amélioré la situation des « barrages souterrains » et eu un impact positif sur la nappe phréatique.

« Le taux de remplissage des barrages est strictement proportionnel aux quantités de précipitations qui tombent dans leurs bassins versants », a poursuivi M. Marzouki, tout en rappelant que nous avons traversé une période de sécheresse durant les années précédentes. Il a également précisé que la région du nord-ouest, qui contient le plus de barrages, n’a pas occupé la première place en matière de précipitations cette saison. Il a indiqué que les régions du centre et du Cap-Bon ont connu d’importantes précipitations. « Ce constat met en lumière la difficulté du transfert des eaux à partir de ces barrages vers le barrage de Sidi Salem, qui est la dernière maille avant la distribution de l’eau aux citoyens », a ajouté M. Marzouki.

« Il est irrationnel d’évoquer de grands projets hydriques ou des stations de dessalement d’eau de mer, alors que notre réseau de distribution d’eau nous fait perdre un tiers des ressources à cause des fuites dans les canalisations », a déploré l’invité d’Amine Ben Doua. Il a également critiqué l’intervention de plusieurs établissements publics dans le domaine hydrique, ce qui nuit fortement à l’efficacité de ce secteur. « Les employés de la Société tunisienne d’exploitation et de distribution des eaux (Sonede) utilisent des outils de travail rudimentaires dans plusieurs régions du pays », a ajouté Ala Marzouki, tout en appelant à placer ce secteur sous la tutelle d’un seul ministère.

« Il y a deux ans, le rapporteur spécial de l’ONU avait indiqué, suite à sa visite en Tunisie, que plus de 50 % de l’eau potable en Tunisie n’était pas de qualité », a déclaré le président de l’Observatoire tunisien de l’eau. Il a poursuivi : « En gros, nos responsables adoptent cette idée : nous fournissons une eau potable qui ne te tue pas », tout en déplorant la qualité des eaux distribuées, qui dépasse, dans le gouvernorat de Gabès par exemple, deux grammes de sel par litre d’eau. Il a également rappelé : « En 2017, des enfants sont morts à cause de la qualité de l’eau distribuée ».

Au sujet de l’intention des autorités algériennes de construire des barrages proches des frontières avec la Tunisie et de l’impact sur notre agriculture, M. Marzouki a expliqué que les deux pays partagent des cours d’oueds et que, pendant la pandémie, l’Algérie a construit deux barrages proches des frontières tunisiennes, ce qui a aggravé la situation hydrique en Tunisie, selon lui. Il a également rappelé qu’une commission mixte entre les deux pays a été constituée pour revoir cette situation, mais sans aucun résultat concret jusqu’à ce jour.

« Il y a une absence totale de diplomatie hydrique », a dénoncé Ala Marzouki, tout en indiquant qu’en dépit de l’accord entre la Tunisie, l’Algérie et la Libye relatif à la nappe phréatique partagée entre ces trois pays, le projet d’amendement du Code des eaux et d’autres conventions internationales, la situation du secteur ne montre aucun signe d’amélioration, surtout que la Tunisie a été totalement absente en matière de prise de position face aux agissements des pays voisins qui nuisent au secteur. « L’état du secteur des eaux est similaire à l’état du pays », a-t-il ajouté.

Concernant le Code des eaux et les réformes nécessaires, Ala Marzouki a déclaré : « Il est impératif de garantir le droit à l’assainissement pour les zones rurales ». Il a également annoncé l’existence de plusieurs projets de privatisation du secteur, tout en appelant la présidence du gouvernement à agir afin de régler la problématique d’un Code des eaux devenu obsolète.

« Il est insensé que le ministère de l’Agriculture possède la compétence exclusive en matière d’augmentation du prix de l’eau. Nous sommes le seul pays au monde à avoir augmenté le prix de l’eau trois fois en pleine pandémie, alors que d’autres pays ont distribué l’eau gratuitement face à la crise sanitaire », a déclaré Ala Marzouki.

« Quand je vois le ministère de l’Agriculture inaugurer un projet privé d’un million d’oliviers à Tataouine, je ne peux y voir qu’une forme de complicité de leur part. Quant à la licence accordée à l’usine d’eau en bouteille à Siliana, qui fait l’objet d’un recours pour illégalité, c’est encore le ministère de l’Agriculture qui a donné son feu vert, alors même que son prédécesseur l’avait refusée vu que la nappe peine à satisfaire les besoins des agriculteurs locaux », a conclu M. Marzouki.

 

 

 

H.K