Lorsque Donald Trump a remporté l’élection présidentielle, en novembre 2024, les élites européennes semblaient penser que les Etats-Unis deviendraient un peu plus isolationnistes, un peu plus nationalistes, mais que la continuité prévaudrait : Trump exigerait que l’Europe paie davantage pour sa défense, mais l’OTAN – et la garantie de sécurité américaine, cruciale pour l’Europe – survivrait.
Aujourd’hui, nous savons que c’était une grossière erreur. Le président des Etats-Unis ne veut rien de moins qu’une rupture complète avec les règles et alliances que des générations de décideurs américains ont patiemment construites dans les décennies suivant la seconde guerre mondiale. Désormais, la Russie, et non l’Union européenne, sera le partenaire proche des Etats-Unis. Ce n’est plus la solidarité des démocraties qui compte à Washington, mais l’accord entre dirigeants autoritaires de grandes puissances mondiales ; la force l’emporte de nouveau sur le droit.
En témoigne l’approche de Trump concernant la guerre d’annihilation que la Russie mène en Ukraine. Trump souhaite mettre fin au conflit aussi rapidement que possible en étroite coopération avec le président russe, Vladimir Poutine. L’Ukraine et l’Europe sont exclues du jeu, alors que ce sont elles qui devront supporter la plupart des conséquences politiques et matérielles de cette négociation.
Voilà à quoi ressemble la vision trumpienne de l’ordre international : un retour aux sphères d’influence, avec les grandes puissances dictant le sort des petits pays. Voit-il que cette approche place les Etats-Unis sur une voie d’affaiblissement, voire d’autodestruction, en commençant par miner l’Occident ? L’Alliance atlantique a renforcé Washington et a contribué à la victoire de l’Ouest pendant la guerre froide : quel intérêt national les Etats-Unis auraient-ils à la sacrifier, avec l’Ukraine, aux pieds de Poutine ?
Image pitoyable
Rien de tout cela n’a de sens, et pourtant tout était prévisible. Les dirigeants européens savaient à quoi s’en tenir avec une deuxième présidence Trump. Ils savaient qu’il était sérieux dans sa volonté de transformer la démocratie en oligarchie et d’établir un nouvel ordre mondial autoritaire. Ils savaient qu’avec Poutine à l’Est et Trump à l’Ouest se profilait un scénario stratégique cauchemardesque. Pourtant, ils n’ont presque rien fait pour parvenir à une plus grande unité politique et à des capacités de défense plus solides.
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