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En Corée du Sud, la hausse des naissances ne résoudra pas la crise démographique

- Business
février 26, 2025

“La chute vertigineuse des naissances s’est enfin arrêtée”, proclame le quotidien sud-coréen JoongAng Ilbo en rapportant l’annonce officielle du mercredi 26 février du taux de natalité de 2024 − 0,75 enfant par femme, soit 0,03 % de plus qu’en 2023 − ainsi que du nombre de naissances − 238 300, soit 8 300 de plus qu’en 2023. “Des hausses inconnues depuis neuf ans”, se réjouit le journal.

Cette dernière nouvelle insuffle de l’espoir en Corée du Sud, très préoccupée par la crise démographique, sa population de quelque 51 millions d’habitants décroissant depuis 2019. Le taux de fécondité du pays reste néanmoins le plus bas de la planète, et loin du seuil de renouvellement des générations (2,05 enfants par femme).

“Il n’y a pas de quoi faire la fête, mais le fait que la courbe soit inversée est très encourageant”, commente Kim Yeong-mi, professeure à l’université Dongseo, spécialiste de la protection sociale et ancienne directrice adjointe de la Commission contre la baisse des naissances et le vieillissement de la population. Elle exprime sa satisfaction au vu des résultats du travail de la commission, dont “la priorité depuis 2023 est de soutenir tous ceux qui veulent fonder une famille”.

En effet, les aides financières du gouvernement et des collectivités locales se sont multipliées ces dernières années. Le journal Kukmin Ilbo a récemment rapporté qu’un couple vivant sur l’île de Jeju, située au sud de la péninsule, qui vient de donner naissance à des triplés, devrait percevoir au total plus de 100 millions de wons [environ 66 000 euros] dans les années à venir.

“Pas beaucoup de raisons d’être optimistes”

La statisticienne Pak Hyeon-jeong, citée par le journal Hankyoreh, reconnaît l’effet produit par les différentes mesures politiques, mais évoque par ailleurs une explication plus naturelle du renversement de la tendance, à savoir l’augmentation du nombre de femmes trentenaires, tranche d’âge essentielle pour la procréation. “Les femmes nées entre 1991 et 1995, aujourd’hui trentenaires, étaient au nombre de 330 000 chaque année, tandis qu’il y en avait plutôt 300 000 par an entre 1984 et 1990. La cause en est la suppression en 1990 de la planification familiale destinée à limiter les naissances”, précise-t-elle. Et Hankyoreh ajoute que le volume de cette catégorie de la population retombera au niveau précédent pour la prochaine génération.

“Nous n’avons pas beaucoup de raisons d’être optimistes”, affirme de son côté dans JoonAng Ilbo Lee Cheol-hui, professeur d’économie à l’université nationale de Séoul. Il rappelle que “la hausse est très peu significative par rapport à la chute que le pays a connue pendant plusieurs années”, ajoutant une autre explication de circonstance, à savoir la hausse des mariages. Beaucoup de couples ont célébré en 2022 ou 2023 des noces reportées durant la pandémie de Covid-19.

D’après Hankyoreh, le taux de natalité demeurera problématique tant que la situation des jeunes restera précaire. Yun Hong-sik, professeur de l’université Inha, pense que les “mesures politiques ont tout juste permis de freiner la chute. De véritables améliorations ne seront pas possibles sans la résolution des problèmes de logement et d’emploi.” Et le journal de rappeler que, en décembre 2024, 411 000 jeunes de moins de 30 ans ne travaillaient pas, soit 45 000 de plus que l’année précédente.