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La condamnation de Cristina Kirchner à six ans de prison divise les Argentins

In Business
juin 11, 2025

Ce mardi 11 juin en fin d’après-midi, les trois juges argentins de la Cour suprême ont mis “un point final à la carrière politique de Cristina Kirchner”, selon El País America, depuis Buenos Aires.

Le plus haut tribunal argentin a confirmé et rendue active la condamnation de l’ancienne présidente pour corruption dans le cadre d’attribution de marchés publics à son fief de Santa Cruz (Patagonie) durant ses deux mandats (2007-2015) : six ans de prison et une vie d’inéligibilité, avec interdiction d’exercer toute charge publique.

Il n’y a plus de recours légal possible : la leader de l’opposition péroniste a jusqu’à mercredi prochain pour se rendre à la justice. Son âge, 72 ans, lui permettra d’éviter la prison et de purger sa peine à domicile (la loi argentine le permet pour tout condamné à partir de 70 ans).

“Jamais aucun président argentin n’a fini prisonnier dans une affaire de corruption avec une condamnation ratifiée par la Cour Suprême, rappelle El País America. Carlos Menem avait purgé presque six mois de prison à domicile en 2001 pour vente illégale d’armes en Croatie et en Équateur, alors sous embargo international, mais la Cour Suprême n’avait jamais traité son cas. Il avait finalement été libéré et est mort en liberté vingt ans après, alors qu’il exerçait une charge de sénateur.”

“Historique”

C’est l’aboutissement d’un processus judiciaire de près de dix-sept ans, et un coup de tonnerre en Argentine, où la figure de l’ancienne présidente divise toujours.

“Le pays a vécu ce mardi [11 juin] un de ces jours que l’histoire enregistrera comme unique, et dont la société se souviendra même lorsque le temps aura largement passé, écrit le quotidien conservateur La Nacion. […] Il s’agit de justice, et non de persécution.”

Alors que ses détracteurs, qui attendaient cette décision de justice depuis de longues années, laissaient exploser leur joie sur les réseaux sociaux (le hashtag #CristinaLadrona [“CristinaVoleuse”] a été en top des sujets abordés sur X), les partisans de l’ancienne présidente se sont mobilisés toute la nuit pour la soutenir dans plusieurs points du pays, notamment devant sa résidence, à Buenos Aires.

“Des larmes, des pleurs et une veillée infatigable”, titre le quotidien progressiste Página 12. “Je ressens une impuissance et une rage terribles”, raconte au journal une femme présente à la veillée qui a rassemblé plusieurs milliers de personnes. “On a une Cour suprême corrompue, c’est du lawfare [usage de l’appareil judiciaire à des fins de persécution politique] à tous crins. Le peuple doit réagir, ça ne peut pas terminer comme ça.”

“Lawfare” ?

L’ancienne présidente est plusieurs fois sortie sur son balcon pour saluer la foule, et a accusé les trois juges de la Cour suprême d’être “un triumvirat d’individus indignes”, qui se limite à obéir aux ordres du “pouvoir économique concentré”, comme la cite El País America.

En Argentine, nombreux sont ceux qui n’acceptent pas la sentence, qu’ils jugent “antidémocratique, comme le titre le site d’information de gauche La Izquierda Diario. La Cour suprême a proscrit politiquement Cristina Kirchner.”

Le terme de lawfare revient très fréquemment. “Ce type d’instrumentalisation de la justice rappelle le cas ‘Lava Jato’ au Brésil, où des accusations judiciaires très questionnables ont été utilisées pour déplacer politiquement Lula da Silva et le Parti des travailleurs (PT), marquant une tendance préoccupante pour la région”, assure La Izquierda Diario.

Le président argentin d’ultradroite Javier Milei a lui réagi par un laconique message sur X : “Justice. Fin.”

Mais est-ce vraiment la fin pour Cristina Kirchner ? Elle reste une figure importante de l’opposition et pourrait, depuis sa captivité, continuer d’influencer la vie politique argentine. D’autant que la mobilisation populaire peut être amenée à évoluer, plusieurs marches de soutien ayant été annoncées pour la journée de mercredi 12 juin.