Sur le tee-shirt arboré par le journaliste allemand Jürgen Elsässer, les mots “Pourfendeur du gouvernement” sonnent comme une revanche. Le magazine qu’il dirige, le média d’extrême droite Compact, avait été interdit en 2024 par les autorités allemandes. Elles avaient estimé qu’il constituait une menace pour la démocratie. Mais “mardi [24 juin], la Cour administrative fédérale est revenue sur cette interdiction”, rapporte Der Spiegel.
En Allemagne, le procès sur l’interdiction du magazine a été très suivi. Au cœur de l’instruction : le concept de “remigration”, relayé en Allemagne par l’Autrichien Martin Sellner et par des membres de la formation d’extrême droite Alternative pour l’Allemagne (AfD). Car le terme a été largement repris par Compact dans ses articles portant sur la politique migratoire de la République fédérale.
Sur ce point, le tribunal a été clair, ce principe est “clairement anticonstitutionnel”, rapporte l’hebdomadaire centriste. “Sellner fait une distinction entre les citoyens allemands selon qu’ils sont issus de l’immigration ou non, une vision contraire aux principes de la Constitution.” Il appelle les Allemands d’origine étrangère qu’il juge “non assimilés” à quitter le pays. Pour le tribunal, cela n’est “pas compatible avec le respect de la dignité humaine”.
L’AfD en ligne de mire
Mais “tout cela ne suffit pas, selon la Cour, à justifier une interdiction”. Le magazine d’extrême droite ne couvre pas uniquement les questions migratoires, a remarqué le tribunal. Cela signifie que ses travers inconstitutionnels ne sont pas “prépondérants”. “Et les ‘critiques clivantes du pouvoir ’ qui y sont exprimées, selon les termes de la Cour, sont couvertes par la liberté d’expression et de la presse.”
D’après le Spiegel, Compact n’est pas le seul gagnant de ce procès. Alors que les débats sur l’éventuelle interdiction de l’AfD secouent l’Allemagne, cette victoire concerne aussi la formation politique, récemment qualifiée d’“extrémiste d’extrême droite” par l’Office fédéral de protection de la Constitution. C’est en tout cas ce que semble penser Jürgen Elsässer. “‘S’il est impossible d’interdire Compact, il ne sera pas non plus possible d’interdire l’AfD’, a-t-il déclaré à la sortie du tribunal.”