
“Thomas Crooks avait des comportements étranges. Il dansait parfois, tard dans la nuit, à travers sa chambre. D’autres fois, il se parlait à lui-même avec de grands gestes. Ces comportements inhabituels se sont accentués l’été dernier, alors qu’il venait d’être diplômé d’un institut du supérieur avec la plus haute mention. Il s’est aussi rendu sur un stand de tir, a laissé pousser ses fins cheveux bruns et a cherché en ligne ‘syndrome dépressif sévère’ et ‘épisode dépressif’. Son père a remarqué que quelque chose avait changé ; les problèmes de santé mentale étaient connus dans la famille.”
Ce sont quelques-uns des principaux enseignements de l’enquête menée par The New York Times sur ce jeune homme qui a failli changer radicalement l’histoire le 13 juillet 2024, en tentant d’assassiner Donald Trump à Butler, en Pennsylvanie, en pleine campagne présidentielle.
Comment ce garçon doué à l’école et sans histoire en est-il venu à cibler le futur président républicain, effleurant son oreille ? Ce mystère est au cœur de l’article qui s’ouvre sur une vidéo de Thomas Crooks en 2022, en jeune étudiant évoquant d’une voix très posée sa “passion de créer et construire des choses”. “Moins de deux ans plus tard, il est monté sur un toit et a tiré huit balles sur Donald Trump.” Il a tué un membre du public et en a blessé deux autres, avant d’être abattu par le Secret Service.
Pour tenter de le comprendre, le journal s’est penché sur “des milliers de pages de devoirs scolaires, d’emails et d’archives de ses activités en ligne, des textos, des rapports des autorités et des entretiens avec des dizaines de personnes qui l’ont côtoyé ou ont eu connaissance de l’affaire”.
“Graduel” et “discret”
L’évolution qu’esquisse le New York Times a été assurément “graduelle” et “discrète”, comme le souligne le titre de l’article qui avance l’idée d’un “délitement” psychologique. Parmi les proches de Thomas Crooks, rares sont ceux à avoir remarqué quelque chose.
Plus centré au lycée sur les cryptomonnaies et l’économie que sur la politique, le jeune homme semblait plutôt “au centre” de l’échiquier et s’est inscrit comme électeur républicain à 18 ans, après avoir donné de l’argent en janvier 2021 à un comité soutenant les démocrates, indique le journal. Toutefois, en avril 2023, il a déploré dans un essai “les campagnes clivantes et incendiaires qui déchirent le pays”.
C’est à peu près à ce moment-là qu’il a commencé à acheter des armes à feu en ligne, ajoute le journal. Il a aussi commandé des produits explosifs qu’il a stockés.
Malgré les indices de troubles psychiques, le FBI a indiqué n’avoir pas trouvé trace d’un traitement. La motivation de son acte n’a pas été déterminée. De quoi alimenter les théories du complot, souligne le journal.
Pourtant, ajoute le New York Times, même le très trumpiste Kash Patel, nommé par l’actuel président à la tête du FBI, a récemment déclaré sur Fox News qu’il n’y avait à ce jour rien de fracassant dans cette histoire. Sinon, a-t-il assuré, “on vous l’aurait dit”.