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Le dessin animé pro-Milei qui endoctrine les petits Argentins

In Business
juin 02, 2025

Les subsides d’État sont ce qu’il y a de pire. Le socialisme est un système qui ruine les pays et doit être éradiqué. Pourquoi l’université ne sert à rien ou quels sont les dangers des familles monoparentales ? Voilà quelques-uns des sujets abordés par Tuttle Twins, le dessin animé phare de la nouvelle grille des programmes de la chaîne de télévision publique pour enfants, Paka Paka, qui est vue par des millions de foyers argentins.

Ses protagonistes sont Emily et Ethan Tuttle, des jumeaux qui voyagent dans le temps avec leur grand-mère cubaine et rencontrent des économistes libéraux tels qu’Adam Smith, Ludwig von Mises ou Milton Friedman. Le rôle du méchant récurrent est occupé par Karl Marx, et le président argentin, l’anarcho-capitaliste Javier Milei, y fait une apparition.

“Cette série, qui compte trois saisons, est financée et produite par la fondation Libertas, installée dans l’Ohio et dont la mission est la diffusion internationale des idées du libéralisme économique extrême, hostile à l’État et ultraconservatrices au niveau social”, explique le quotidien conservateur La Nacion.

“Bataille culturelle”

Durant sa campagne, Javier Milei avait beaucoup critiqué l’“endoctrinement” supposé des enfants argentins par le péronisme alors au pouvoir, à travers l’école, mais aussi par le biais de cette même chaîne de télévision, Paka Paka. “Et ça maintenant, ce n’est pas de l’endoctrinement ?” se demande dans son titre El Economista.

“Malgré la promesse d’une nouvelle programmation sans teinte idéologique et qui met ‘les valeurs au centre’ [selon un communiqué du gouvernement], les épisodes abordent explicitement des arguments qui sont au cœur de la ‘bataille culturelle’ que mène le gouvernement”, regrette La Nacion dans un autre article.

Un éditorial du quotidien progressiste Pagina 12 est sans appel :

“On programme un endoctrinement sans précédent des enfants et adolescents, à travers des images qui démonisent toute trace de solidarité, de sensibilité envers la souffrance d’autrui et retire toute valeur à l’éducation publique.”

Contenu importé des États-Unis

Plusieurs spécialistes de l’éducation ont également exprimé leurs critiques, comme Cecilia Veleda, docteure en sciences de l’éducation, interrogée par La Nacion : “On ne peut pas prendre les enfants en otage au milieu de disputes idéologiques d’adultes. Il s’agit d’obsessions personnelles du président, traduites en contenus erronés remplis de mensonges, de discriminations et d’attaques, et qui ne sont en aucun cas liées aux programmes scolaires.”

Martin Becerra, chercheur en communication, assène un autre argument, toujours dans La Nacion : “Ce contenu est importé [des États-Unis], créé pour une réalité différente de la nôtre. Il ne reflète ni notre culture, ni notre histoire, ni notre présent. C’est un contenu dogmatique, qui, même aux États-Unis, a été critiqué pour son sectarisme et son agressivité.”

Dans l’entourage du président, la défense de Tuttle Twins ne s’est pas fait attendre. L’un de ses principaux communicants, Daniel Parisini, a ainsi publié sur ses réseaux sociaux ce message, que reprend le site d’information Ambito Financiero : “Si l’endoctrinement est de droite, alors ce n’est pas de l’endoctrinement. Parce que nos idéologies ne sont pas équivalentes. Enseigner le socialisme n’est pas comme enseigner le libéralisme. […] L’un défend la réalité, l’autre un fantasme. Enseigner l’un est bien, enseigner l’autre est mal.”

Dans un contexte où le gouvernement de Javier Milei coupe chaque jour d’avantage dans les budgets de l’État, la somme que ce dessin animé a coûtée à l’Argentine n’a pas été communiquée.