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les jeunes filles “martyres” des coutumes

- Business
janvier 12, 2025

C’est une matinée banale au trafic dense, à Kaya, capitale de la région du Centre-Nord, à une centaine de kilomètres au nord-est de la capitale du Burkina Faso, Ouagadougou, que décrit le quotidien gouvernemental Sidwaya. “À pied, à vélo, à motocyclette ou dans des voitures, les élèves, reconnaissables [à] leurs tenues scolaires, se rendent à l’école.”

Un ballet dont Awa Ouedraogo, “15 ans, sortie de la cour pour jeter l’eau du bain de son nourrisson de 7 mois”, est devenue une amère spectatrice.

COURRIER INTERNATIONAL

“‘Aller à l’école ne fait plus partie de mon quotidien. Quand je me réveille, je balaie la cour. Je fais la vaisselle. Je lave mon bébé et je prépare à manger pour mon mari’, dit l’ancienne élève et déplacée interne, qui nous reçoit à l’insu de son époux”, narre Sidwaya dans une enquête consacrée à la hausse des mariages précoces à la faveur de l’insécurité.

Awa a fui son village, dans le nord de la région, à la suite de l’incursion de groupes djihadistes. Les écoles y avaient fermé dès 2021. Depuis lors, elle vit “une enfance brisée loin des bancs [de l’école]”, selon le titre de cette enquête. “Pis, son père l’a donnée en mariage pour honorer une ‘vieille’ promesse”, poursuit Sidwaya.

Fugue

Bien que punis par la législation burkinabè, les mariages d’enfants perdurent et s’intensifient, dans le contexte de fermeture de nombreuses écoles et de paupérisation des familles. Ils concernaient 2,8 millions d’individus en 2022, selon l’Unicef. Les filles “courent 2,5 fois plus de risques d’être déscolarisées que les garçons dans une situation de crise”, estimait de son côté en 2021 l’ONG Plan International.

Les fugues de jeunes filles se sont également multipliées. Fatimata Bamogo, une orpheline de 14 ans qu’un oncle a tenté de marier à un homme d’une cinquantaine d’années, a fui la nuit dans un cimetière “pour échapper à son bourreau”. “Le regard hagard, les mains croisées entre les jambes”, elle conte son récit au centre Maria-Goretti de Kaya.

Un foyer religieux qui “accueille 105 jeunes filles, […] dont 85 d’entre elles ont fui des noces ‘forcées’”. Les arrivées augmentent, les filles étant “devenues une charge pour leurs parents”, constate la responsable du centre, Véronique Kansono.

Celle-ci insiste sur la nécessité d’“aménager les coutumes”, certes “riches”, mais dont ces jeunes filles sont aussi devenues des “martyres”.