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Mais pourquoi les Anglo-Saxons s’interdisent-ils d’écrire “fuck” en toutes lettres ?

- Business
février 08, 2025

Dans un récent article, j’avais mis cinq fois le mot fuck. À sa parution, bien évidemment, tous mes fuck avaient perdu trois de leurs quatre lettres : sur le papier, n’apparaissait plus que f***, sans le u, le c, et le k.

C’est toujours pareil. Vous écrivez f*** parce que quelqu’un a dit “f***” et que vous tenez à citer vos interlocuteurs avec précision, mais vous le savez bien : à peine le mot sera-t-il posé sur la page qu’il sera lamentablement amputé. Ah ça, personne ne voit rien à redire à luck, duck ou suck [“chance”, “canard” et “téter”, en français], mais f***, pas moyen.

Mais pourquoi diable ? Serions-nous encore trop timorés [à notre époque] pour lire ce mot, qui compte parmi les plus usités de la langue anglaise ? Le lectorat s’indigne-t-il vraiment de ce terme au motif que, son sens premier étant, c’est incontestable, sexuel et pénétrant [et pouvant être traduit en français par l’adjectif “enculé” ou le verbe “baiser”], il serait donc obscène ? Et si oui, pourquoi ces pudeurs de rosière ?

Des sortes de haïkus

La personne faisant l’objet de mon article avait utilisé le mot en f un certain nombre de fois durant notre entretien, et j’avais fidèlement reproduit ses propos. Elle avait dit “No f***ing way”, “What the f***”, “Holy f***” et “What the actual f***” [diverses façons d’exprimer, en l’occurrence, sa joie et son étonnement, et qu’on pourrait traduire, dans l’ordre (ou pas), par “Bordel de merde”, “Mais putain”, “Vingt dieux de merde” et “Merde alors !”]. Et un peu plus loin, elle disait aussi [à un wallaby qu’elle s’apprêtait à tuer pour le manger] : “Oh you beautiful thing. Holy f*** I’m sorry” [“Ce que tu es beau toi. Putain de merde, excuse-moi”].

L’interviewée faisait du mot un usage pour le moins frappant, et elle le déclinait dans des sortes de haïkus sur lesquels on avait presque envie de danser. Mais mon papier est paru, et les lettres objet du délit avaient été caviardées. Franchement, je vous le demande : WTF [soit : what the fuck] ?

Tous les soirs, au JT, c’est une avalanche d’images de villes dévastées par des campagnes de bombardements incessantes, d’hôpitaux débordés par l’afflux de malades et de mourants, de charniers creusés pour des familles entières, d’enfants qui mendient à manger ou qui errent parmi leurs maisons ravagées dans un paysage d’apocalypse.

Sur les réseaux sociaux, c’est un déferlement de scènes de torture, de meurtres, d’exécutions publiques. C’est un déluge d’images de porno hardcore où des hommes prennent du plaisir en infligeant des violences à des femmes. La misogynie, les humiliations publiques, les discours de haine s’épanouissent sans que nul n’y trouve à redire. Des vannes du streaming, grandes ouvertes, se déversent sur nos cerveaux si