En cette mi-février, la Corée du Sud pleure l’une de ses figures féministes historiques. Gil Won-ok, ancienne “femme de réconfort” sud-coréenne de 95 ans, est morte le 16 février à son domicile d’Incheon, à l’ouest de la Séoul, a rapporté le quotidien sud-coréen JoongAng Ilbo dans son édition japonaise.
“Femme de réconfort” est la traduction abrégée du mot japonais jugun-ianfu, qui est en effet l’euphémisme désignant les victimes du système de la prostitution forcée mis en place dans les années 1930 et 1940 par l’armée japonaise. Des femmes de divers pays – Corée du Sud, Corée du Nord, Chine, Taïwan, Philippines, Indonésie, Pays-Bas, Japon – ont fait l’objet de ce système installé officiellement pour réduire le nombre de viols sur le front et empêcher la propagation des maladies sexuellement transmissibles parmi les soldats.
Selon les historiens, le nombre de victimes de ce système est estimé à plusieurs dizaines de milliers, voire plusieurs centaines de milliers. Ce dossier, qui donne lieu à une intense campagne des négationnistes au Japon, reste une plaie dans les relations entre Tokyo et Séoul, revenant régulièrement dans l’actualité.
“Un mal indicible me déchire le cœur”
En Corée du Sud, les survivantes de ce système ont joué, et jouent, un rôle important dans le mouvement féministe. En parlant de Gil Won-ok, le quotidien sud-coréen Hankyoreh salue “une militante pour les droits des femmes et la paix”. “En visitant bien des pays comme le Japon, la Suisse et les États-Unis, elle a témoigné de son expérience afin de faire connaître la réalité des ‘femmes de réconfort’ à la fois en Corée du Sud et à l’étranger”, continue le journal.
“Toutes les anciennes ‘femmes de réconfort’ victimes de l’armée japonaise attendaient un dédommagement juridique de la part du gouvernement nippon. Un mal indicible me déchire le cœur quand je pense à mes amies qui sont parties sans en recevoir”, raconte au quotidien, larmes aux yeux, Lee Yong-soo, une autre survivante, de 96 ans. “Il faut que le Parlement et le gouvernement [coréens] s’emploient à pousser le gouvernement japonais à s’excuser et à accorder des dédommagements”, a-t-elle continué.
Parmi les 240 anciennes “femmes de réconfort” qui étaient enregistrées par le gouvernement sud-coréen, seules sept sont encore en vie. Leur moyenne d’âge est aujourd’hui de près de 96 ans, selon des informations relayées par JoongAng Ilbo.