Je me tiens au bord du boulevard Shahrah-e-Faisal, là où Karachi transpire comme un lingot de plomb surchauffé à la porte d’un haut-fourneau. Respirer l’air donne l’impression que quelqu’un essuie mes poumons avec une couverture mouillée. Le bruit de la circulation – le grincement des touk-touks, le bruit des sabots des charrettes, le grondement des Suzuki cabossées – me plonge dans un état au seuil du délire.
Non loin, sur la droite, un corps enveloppé d’un linceul blanc repose à l’arrière d’un pick-up, entouré de proches éplorés. Leurs visages montrent qu’ils ont vu beaucoup trop de ces paquetages. À gauche, des enfants mendient. Une petite armée se battant pour quelques sous. Un motard manque de les percuter, puis poursuit sa course comme si de rien n’était.
Je me tiens debout au milieu de ce chaos, dans mon tee-shirt Motörhead trempé de sueur qui me colle au corps comme une seconde peau, et j’attends de rencontrer Tabahi, le seul groupe de thrash metal du Pakistan.
Des inspirations mondiales
“Salut mon pote ! Je t’ai reconnu à ton tee-shirt !” me hurle Faiq, le guitariste de Tabahi, alors qu’il gare sa voiture sur le bas-côté. Lorsque je monte à bord, il porte un tee-shirt de Dio [un groupe de heavy metal américain (1982-2010