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Le Burundi « accélère » le retrait de ses troupes déployées dans l’est de la RDC

- Monde
février 21, 2025

Le Burundi « accélère » le retrait de ses troupes déployées dans l’est de la République démocratique du Congo (RDC) face à l’avancée du Mouvement du 23-Mars (M23) et de ses alliés rwandais, a affirmé à l’Agence France-Presse (AFP), jeudi 20 février, une source militaire de ce pays des Grands Lacs qui connaît par ailleurs un afflux de réfugiés inédit depuis vingt-cinq ans.

Le groupe armé antigouvernemental M23, soutenu par des forces rwandaises, s’est emparé ces dernières semaines de Goma et Bukavu, capitales provinciales du Nord-Kivu et du Sud-Kivu, après avoir conquis ces dernières années de vastes pans de cette région riche en ressources naturelles. Mercredi, l’ONU s’est inquiétée de l’avancée des combats vers « d’autres zones stratégiques » de l’Est congolais, soulignant le risque « plus que jamais réel » d’un embrasement régional. Les combats des dernières semaines font craindre une répétition de ce que l’on a appelé la deuxième guerre du Congo (1998-2003), impliquant de nombreux pays africains et entraînant des millions de morts par la violence, les maladies et la famine.

Le Burundi, qui a déployé depuis 2023 plus de 10 000 soldats en soutien à l’armée congolaise, avait déjà, malgré les démentis officiels, commencé à retirer des troupes, selon des sources interrogées par l’AFP.

Mais depuis mercredi, « l’armée a accéléré l’extraction de [ses] soldats déployés dans la plaine de Rusizi [frontalière du Burundi], en RDC, avant qu’ils ne soient piégés par l’arrivée du M23 à Uvira », a affirmé jeudi un haut gradé de l’armée burundaise sous le couvert de l’anonymat, précisant qu’une partie des soldats, n’ayant pas pu rejoindre à temps la plaine de Rusizi et Uvira, « sont coincés dans le secteur déjà tombé aux mains de l’ennemi ». « Nous faisons face à un sérieux problème de ravitaillement de nos soldats qui sont toujours en RDC », a-t-il ajouté, critiquant une armée congolaise « totalement désorganisée ».

« Nous manquons de tout »

La commune d’Uvira, côté congolais, fait pratiquement face, de l’autre côté de la frontière, à Bujumbura, la capitale économique du Burundi. Une frontière que des milliers de familles congolaises ont traversée ces derniers jours, empruntant un couloir économique et humain crucial dans cette zone enclavée des Grands Lacs.

« C’est la plus grande vague de réfugiés que le Burundi connaît depuis le début des années 2000 », a affirmé mercredi la représentante du Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) au Burundi, Brigitte Mukanga-Eno, lors d’une conférence de presse à Bujumbura, estimant à 6 000 le nombre de familles entrées au Burundi et à 30 000 celui des réfugiés. Les autorités burundaises avaient évoqué 10 000 personnes lundi. « Ces chiffres sont tout à fait temporaires, puisque malheureusement les gens continuent d’affluer par milliers chaque jour », a-t-elle ajouté, mentionnant comme points chauds les provinces frontalières de Bubanza et Cibitoke.

Avant cette vague, le Burundi comptait, selon le HCR, environ 90 000 réfugiés sur son sol, essentiellement des Congolais venus notamment pendant les deux guerres du Congo (1996-1997 et 1998-2003). Le ministère burundais de l’intérieur a affirmé qu’il octroierait le statut de réfugié à tous les Congolais entrés depuis janvier.

Jointe par téléphone, « Maman Cady », une Congolaise d’une soixantaine d’années qui n’a souhaité donner que son surnom, est arrivée dimanche dans le stade de Rugumbo (province de Cibitoke), où sont rassemblés de nombreux réfugiés. « On dort part terre dans le stade, à la belle étoile, on n’a pas encore eu de couverture ou de tente, nous manquons de tout. Nous sommes obligé d’endurer le soleil et la pluie dans ce stade, car on nous empêche de le quitter », témoigne-t-elle. Au même endroit, Kitenge, un moto-taxi de 25 ans ne souhaitant pas donner son nom complet, affirme avoir fui « avant même l’arrivée du M23 » la localité congolaise de Sange, avec sa femme et ses deux enfants, « pour sauver nos vies ».

Le Monde avec AFP

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