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le Kirghizistan, nouvelle échappatoire pour les citoyens russes

- Business
mars 01, 2025

Obtenir un passeport kirghiz n’a jamais été aussi simple pour les Russes. Depuis presque trois ans, un véritable marché s’est développé autour de la naturalisation accélérée, avec des agences russes promettant un passeport en trois à six mois. Le prix du service ? Entre quelques milliers de dollars et 20 000 dollars, selon plusieurs interlocuteurs interrogés par Azattyq, branche de Radio Free Europe/Radio Liberty.

Depuis le début de l’invasion de l’Ukraine, des milliers de Russes cherchent à échapper à la mobilisation, aux répressions politiques ou aux sanctions internationales. “Le passeport kirghiz est présenté comme un moyen d’accéder aux ‘visas dorés’ délivrés par des pays qui ont fermé leurs frontières aux Russes”, souligne Azattyq, qui révèle que le nombre de Russes ayant obtenu la nationalité kirghize a explosé : passant de 400 en 2021 à plus de 7 000 en 2024.

Sur Telegram, YouTube et Facebook, les agences rivalisent d’arguments pour attirer leurs clients. Elles mettent en avant “la reconnaissance du russe comme langue officielle, la ‘stabilité politique’ du pays”, mais surtout les perspectives qu’il offre : selon le Henley Passport Index, le document permet d’entrer sans visa dans 65 pays, rappelle le site kirghiz 24.kg.

“Tu paies et tu l’obtiens”

Officiellement, le Kirghizistan ne reconnaît pas la double nationalité avec la Russie. Pourtant, comme le précise Krym Realii, certaines agences jouent sur des “failles juridiques” pour garantir à leurs clients qu’ils pourront conserver leur passeport russe. “Les citoyens nés avant la chute de l’URSS peuvent obtenir la nationalité kirghize via une procédure simplifiée”, explique un employé d’une agence.

Parmi les nouveaux détenteurs du passeport kirghiz, Azattyq cite notamment Dmitri Zelenin, ancien gouverneur de la région de Tver ; Kirill Kayem, cadre supérieur du centre d’innovation technologique Skolkovo, ainsi que le “polit-technologue” Ilya Gambashidze, sous sanctions internationales pour avoir orchestré des campagnes de désinformation au profit du Kremlin à l’étranger.

L’essor de ce marché inquiète au sein du pays. “Des blogueurs russes se moquent de la facilité avec laquelle il est possible d’acheter la citoyenneté du Kirghizistan : ‘Tu paies et tu l’obtiens’, s’est indigné le député Dastan Bekeshev lors d’une session parlementaire en janvier. Les autorités kirghizes assurent que toutes les demandes sont vérifiées, mais Azattyq explique que la corruption règne. Le média cite un intermédiaire sous le couvert de l’anonymat : “Afin […] de mener à bien ce processus, il faut discuter avec les fonctionnaires qui traitent votre dossier. […] Un ‘paiement’ supplémentaire pourrait accélérer le processus.”

Pendant ce temps, les Kirghiz ethniques d’Ouzbékistan, du Tadjikistan ou du Kazakhstan attendent parfois depuis des décennies, quand d’autres doivent payer pour accélérer leur dossier. “Je suis surpris qu’une personne n’ayant jamais vécu au Kirghizistan puisse obtenir la citoyenneté si facilement, alors que nos compatriotes en sont privés”, dénonce Bekeshev devant le Parlement.