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le prince Harry passe un accord financier avec le groupe Murdoch

- Business
janvier 23, 2025

Le prince Harry a-t-il, comme il l’affirme, enregistré un succès “monumental” contre les tabloïds ? Ou a-t-il tout simplement cédé à l’appât du gain ? La conclusion d’un accord entre le plus jeune fils du roi Charles III et le groupe de médias News Group Newspapers (NGN) suscite des vives discussions dans la presse britannique.

Propriété du magnat des médias Rupert Murdoch, NGN a accepté ce mercredi 22 janvier de verser un montant à huit chiffres au duc de Sussex, afin d’éviter un procès qui devait s’ouvrir la veille devant la haute cour de Londres. Le groupe – qui possède le tabloïd The Sun – a par ailleurs présenté ses excuses à Harry, reconnaissant avoir porté atteinte à sa vie privée et à celle de sa défunte mère, en engageant des détectives privés pour obtenir des informations de manière illégale sur la famille royale.

Le frère du prince William et mari de l’actrice Meghan Markle accusait NGN d’avoir publié plus de 200 articles entre 1996 et 2011 “contenant des informations obtenues de manière illégale”. Mais son action en justice était aussi liée à son aversion pour les tabloïds.

Le prince “avait 12 ans lorsque sa mère, la princesse de Galles [Diana Spencer], est morte dans un accident de voiture à Paris, alors qu’elle était pourchassée par des paparazzis”, rappelle la BBCSelon lui, les tabloïds auraient même “joué un rôle dans sa mort”. L’an dernier, il avait déclaré qu’“ils avaient ‘du sang sur les mains’.

“Aujourd’hui, l’entreprise est moralement vaincue”, se félicite The Guardian. Le petit-fils de la reine Élisabeth II “est un personnage controversé, haï et moqué par une partie des médias, notamment pour ces procédures en justice, et par conséquent clivant pour l’opinion publique, résume le journal de gauche, favorable à l’abolition de la monarchie. Mais, sur ce point précis, il avait sûrement raison. […] Par leur incapacité à expier leurs péchés – et à préférer payer les plaignants –, ces entités malveillantes ont jeté l’opprobre sur l’ensemble du journalisme.” Face à ce constat, les excuses de NGN donnent l’impression que cet épisode peu glorieux se termine “avec justice”.

“L’argent prend le pas sur les principes”

Le titre conservateur The Telegraph ne partage pas cet enthousiasme. Enhardi par une première victoire contre le Mirror Group Newspapers (MGN), le duc de Sussex s’était donné pour mission de révolutionner le monde des médias britanniques, rappelle-t-il. Il avait notamment juré qu’il ferait “tout ce qui serait en son pouvoir pour mettre à terre l’empire de Rupert Murdoch”.

“Mais maintenant, ces belles et nobles paroles sonnent plutôt creux.” D’autant que NGN n’a pas reconnu que les journalistes et les dirigeants du Sun étaient personnellement responsables des activités illégales reprochées au tabloïd, ce qui va à l’encontre de “la volonté du duc, qui répétait avec insistance qu’il allait mettre au jour les ‘dissimulations’ de l’entreprise”.

Pour le prince Harry, cet accord “prend des allures de victoire à la Pyrrhus”, renchérit l’hebdomadaire de droite The Spectator, qui ne cache pas son amertume depuis la rupture du duc de Sussex avec la monarchie, en 2020. Ce procès, “censé durer huit semaines”, aurait dû fait figure d’“heure de gloire” dans sa bataille contre les tabloïds et sa volonté de remodeler le paysage médiatique du Royaume-Uni. Finalement, “nous avons la preuve, s’il en fallait encore, que toutes ses belles paroles et ses intentions courageuses peuvent se monnayer”. À ses yeux, “l’argent prend le pas sur les principes”.

Piratage de boîtes vocales

D’autant que les accusations du duc de Sussex n’étaient pas sans fondement. “Le recours au piratage de boîtes vocales par des journalistes dans le but d’obtenir des informations a été révélé par plusieurs enquêtes du quotidien The Guardian entre 2009 et 2011, retrace Press Gazette, site spécialisé dans l’actualité des médias britanniques. Le scandale avait conduit à la fermeture du tabloïd News of the World, propriété de News Group Newspapers, et à l’emprisonnement de plusieurs responsables éditoriaux.

Depuis, les actions en justice se sont multipliées contre les titres concernés : NGN a scellé des accords avec près de 1 300 personnes, dont l’acteur Hugh Grant, et dépensé l’équivalent de plus de 1 milliard d’euros en quinze ans. Le groupe de médias n’avait encore jamais reconnu publiquement d’actes illégaux.